Un peu plus tôt, Manon s'était levée avec l'idée d'aller chercher les affaires qu'elle avait laissées chez Brian. La dernière fois, qu'elle l'avait vu avait été à la fête de l'été. Manon l'avait attendu mais cet idiot avait préféré finir sa soirée avec la gosse de riche, Willow Johnson.
Bref Brian n'allait sûrement pas être content de la voir débarquer chez lui, mais il fallait bien qu'elle récupère ce qui était à elle !
Après avoir enfilé un ensemble blanc avec une ceinture noire, la jeune femme s'était donc rendue jusqu'à l'appartement de son ex.

Salut, Je viens récupérer mes affaires…

Dit-elle en regardant ses pieds. Puis la brunette attendit que Brian la laisse entrer et fila prendre ce qui était à elle. La jeune femme entra dans la chambre et rangea tout rapidement dans le sac qu'elle avait avec elle. Manon faillit partir et fut interrompue par la sonnette de la porte. Elle resta derrière le mur et reconnut la voix de Willow qui s'était visiblement disputée avec Brian, vu le ton peu aimable qu'elle employait. Manon fit un pas vers la droite pour mieux entendre et fit tomber des objets qui étaient posés sur la table de nuit.

Merde !

Râla-t-elle doucement, avant d'entendre Willow s'énerver derrière le mur en disant qu'elle ne savait pas qu'il était avec cette… Cette ? Manon avait bien failli croire que cette bourge allait l'insulter et elle faisait tout pour ne pas débarquer dans l'entrée et casser la figure de Willow…
Puis Willow continua en disant qu'elle ne savait pas comment Manon avait pu avoir un enfant avec toute la drogue qu'elle prenait…
La jeune femme avala sa salive rapidement et s'écarta du mur. Brian avait l'air d'avoir déjà beaucoup de doutes sur l'enfant, Willow venait en plus aggraver la situation. Il fallait qu'elle sorte d'ici avant que Brian réalise enfin que Manon avait tout inventé. Elle attrapa son sac qu'elle jeta sur son épaule, et ouvrit la fenêtre pour prendre l'escalier de secours. Trop tard… Manon n'eut le temps de passer qu'une jambe de l'autre côté de la fenêtre que Brian était déjà revenu dans la chambre…
Elle se retourna, une jambe toujours à moitié dehors et finit par avouer avant que la situation empire :

Je…Je suis désolée mais je t'ai mentit… J'ai jamais eu d'enfant… dit elle en bafouillant à moitié. Puis elle continua doucement, d'une petite voix, comme une enfant qui allait se faire punir : ...Mais c'était le seul moyen. Tu ne serais jamais revenu avec moi sinon…

Pendant un moment, pas un muscle ne bougea sur le visage de Brian pendant qu'il dévisageait Manon. Puis, tandis que celle-ci restait immobile, comme hypnotisée par le regard du jeune homme, il ne changea pas d'expression et seuls ses yeux s'étrécissant lentement, pour ne plus former que deux fentes, exprimèrent ce qu'il ressentait.

La petite phrase lancée par Willow à propos de la grossesse de Manon avait fait son chemin dans son esprit et il avait surgit dans la pièce dans la ferme intention de demander des explications et surtout d'exiger de voir l'enfant. Voir la jeune femme tenter de fuir par l'escalier de secours avait confirmé le doute qui s'était insinué en lui depuis de longues semaines déjà. Maintenant elle venait d'avouer lui avoir menti et, bien que soulagé d'apprendre qu'il n'était pas père, une fureur intense venait de l'envahir.

Tu veux bien répéter ? demanda-t-il sans presque desserrer les lèvres. Tu m'as berné pendant tout ce temps ? Tu m'as escroqué aussi, si je ne m'abuse ! Il était rentable, ton petit chantage à l'enfant, hein ?!!

S'avançant lentement vers une Manon tétanisée, il lui jeta au visage, d'une voix sourde et sans plus desserrer les dents que précédemment :

Tu t'es bien foutue de moi, sale garce ! Et pourquoi tu voulais revenir avec moi ? Pour me piquer mon fric parce que t'es pas foutue de bosser pour acheter ta came toi-même ? Me dis pas que c'est pour mes beaux yeux, Manon, je te croirais pas !!!

Blanc de rage, il attrapa la jeune femme par le devant de son chemisier et la tira violemment à l'intérieur de la chambre.

Tu crois que tu vas t'en tirer comme ça ? cracha-t-il en la secouant comme un prunier.

Il regarda avec mépris la tête de la jeune femme balloter d'avant en arrière et immobilisa son balancement en ponctuant sa phrase d'une gifle magistrale qui laissa une empreinte sur la joue de son ex petite amie.

Willow est partie, tu as bien réussi ton coup ! hurla-t-il en la giflant à nouveau, si fort qu'elle tituba et partit en arrière. Il la rattrapa à nouveau par le devant du vêtement et se mit à la bourrer de coups sans même regarder où il frappait, dans un état de rage qu'il était bien incapable de contrôler, sourd à ses supplications.
Puis il la lâcha et elle s'effondra à ses pieds.

T'es un peu amochée… lâcha-t-il en la regardant avec indifférence. Tu ne pourras pas te trouver un abruti pour me remplacer avant longtemps, t'es pas belle à voir ! Même dans les bas quartiers tu risques pas de plaire… Et t'avises pas de porter plainte, je dirai que ce n'est pas moi. Une junkie comme toi peut se faire tabasser par n'importe qui…

Maintenant debout ! Tu prends ton paquetage et tu te tires d'ici vite fait ! Pour le moment je suis calmé mais je pourrais m'énerver à nouveau… dit-il en tournant les talons.

Il fila vers le salon et se servit un verre bien corsé pour se détendre. Il avait évacué sa colère, momentanément, mais son tempérament farouche n'attendait qu'une étincelle pour se rallumer.

Manon savait très bien ce qui l'attendait.
A l'époque où ils sortaient ensemble, Manon s'était reçu des coups pour moins que ça. Mais cette fois ci, elle n'avait pas pu encore lui mentir. Inventer de nouveau une excuse à propos du bébé aurait été trop risqué avec ce qu'avait dit Willow Johnson quelques minutes plus tôt. Cette petite garce qui aura décidément tout gâché…

Puis Brian, les yeux toujours plissé par la rage qui l'envahissait petit à petit, demanda sans desserrer les lèvres :

"Tu veux bien répéter ? . Tu m'as berné pendant tout ce temps ? Tu m'as escroqué aussi, si je ne m'abuse ! Il était rentable, ton petit chantage à l'enfant, hein ?!!"

Manon pendant ce temps là était terrorisée. Elle avait les yeux grands ouverts et n'arrivait même plus à prononcer un son. Puis il enchaina en la traitant de garce et en disant qu'elle s'était foutue de lui pour lui piquer son fric parce qu'elle n'arrivait pas à payer sa drogue elle-même. Puis il termina en prévenant de ne pas dire qu'elle était revenue pour ses beaux yeux car il ne la croirait pas.
Elle faillit parler à ce moment là, pour répondre qu'elle était revenue pour lui et qu'elle s'excusait de l'avoir arnaqué pendant plusieurs mois, mais il la tira par le chemisier dans la chambre.
Manon tomba violemment en se cognant les jambes contre les rebords de la fenêtre et les meubles environnant. Puis Brian recommença à hurler, en la secouant dans tout les sens, des phrases que Manon avait du mal à comprendre à cause des coups qu'elle s'était pris sur la tête. Les mains moites, elle se sentait presque flotter comme si elle allait s'évanouir. Mais il se mit à la gifler et recommença en parlant de Willow.

C'est à ce moment là que Manon ressentit, la rage monter en elle. Comme si ce prénom qu'elle ne supportait pas d'entendre, l'avait réveillée de cette inertie qui avait prit possession d'elle depuis que Brian avait surgit dans la pièce.

Arrête ! S'il te plait arrête ! Je ferais tout ce que tu voudras !...

Se mit-elle à hurler, pendant qu'il la frappait de toutes ses forces. Manon essaya de donner des coups dans l'autre sens pour se débattre, même si ça ne servait pas à grand-chose…
Il s'arrêta enfin et Manon tomba à genoux, avant de s'effondrer totalement sur la moquette.

"T'es un peu amochée…" lança t-il indifférent. "Tu ne pourras pas te trouver un abruti pour me remplacer avant longtemps, t'es pas belle à voir ! Même dans les bas quartiers tu risques pas de plaire… Et t'avises pas de porter plainte, je dirai que ce n'est pas moi. Une junkie comme toi peut se faire tabasser par n'importe qui…

Maintenant debout ! Tu prends ton paquetage et tu te tires d'ici vite fait ! Pour le moment je suis calmé mais je pourrais m'énerver à nouveau…"

Il sortit de la pièce et laissa Manon fixer le plafond. Elle n'arrivait presque plus à bouger tellement la douleur était forte.
Brian se fichait d'elle en là traitant presque de prostituée-droguée parce qu'il n'était qu'"envouté" par l'autre gosse de riche. C'était elle sa drogue…

*Il faut que je trouve un moyen de la lui sortir de la tête. Et pas question de partir avant !*

Manon prit son courage à deux mains et se releva difficilement en serrant les dents, puis elle essuya sa lèvre qui saignait et entra comme une furie dans la pièce voisine. Elle y trouva Brian entrain de boire…

Idiot ! Hurla Manon folle de rage, en essuyant une larme. Tout ça à cause de cette bourge !

Puis Manon serra les poings et continua tout aussi fort :

Tu n'as rien à faire avec elle !!!

Je suis désolé de t'avoir piqué de l'argent pendant tout ce temps là. Mais ce mensonge était le seul moyen de te récupérer… avoua-t-elle en se radoucissant peu à peu. Manon avança doucement en se tordant les mains dans tout les sens.
Elle espéra qu'en le prenant par les sentiments il allait se calmer et confia presque en chuchotant :

C'est moi "ton rayon de soleil". Tu te rappelles ? Elle avança sa main lentement vers lui et continua de la même manière : Tu te rappelles de l'effet que ça t'a fait le jour ou j'ai reçu une balle dans le ventre ? Tu te faisais beaucoup de soucis… Tu ne veux pas me perdre…

Je ne veux pas te remplacer, je suis venue pour toi. Nous sommes faits l'un pour l'autre…

Brian était dans un état de rage avancé. Il avait quelque peu malmené Manon, hors de lui d'imaginer à quel point elle s'était moquée de lui : elle lui avait extorqué de l'argent pour élever leur soi-disant enfant, argent qu'il avait déjà du mal à trouver, mais en plus lui avait fait perdre Willow. Il ne fallait pas se leurrer, si sa Willow était partie c'était bel et bien à cause de Manon. Et lui, pauvre naïf, s'était laissé avoir parce qu'il n'avait pas voulu laisser cette mytho élever seul leur fils. Leur fils !!! S'il n'était pas si en colère il en rirait presque. Il n'y avait même pas l'embryon du quart d'un demi bébé, elle avait tout inventé !

Le plus gros de sa colère était tombé mais il ne cessait de ruminer en sirotant son verre. Il n'envisageait pas de la frapper de sang-froid, mais elle ferait tout de même bien de se dépêcher de prendre ses affaires et de décamper.

Plongé dans de sombres pensées, il sursauta quand Manon arriva dans son dos et lui hurla "Idiot !" dans les oreilles.
Il fit volte face et la toisa de haut en bas. Elle était campée sur ses pieds comme un petit coq de combat, les poings serrés et continua en criant après avoir essuyé une larme :

Tu n'as rien à faire avec elle !

Il ferma à demi les yeux et plissa le front pour lui montrer que le volume du son le dérangeait, puis il lâcha sans élever la voix, arborant une expression méprisante.

Je suis avec qui je veux, ma vie privée ne te regarde pas…

Il ne criait pas et paraissait ainsi encore plus menaçant. Trop calme, beaucoup trop calme pour sembler rassurant.
Manon dut le sentir car elle se radoucit et baissa d'un ton.

Je suis désolée de t'avoir piqué de l'argent pendant tout ce temps là. Mais ce mensonge était le seul moyen de te récupérer… dit-elle tandis qu'il sursautait, à nouveau hors de lui.

Tu es "désolée" de m'avoir piqué de l'argent ??? Ce mensonge était le seul moyen de me récupérer ??? répéta-t-il après elle. Autrement dit ta stratégie pour me récupérer était de me piquer mon fric ? Tu sais ce que tu dis, tu entends ce que tu dis ?!!
Effectivement j'ai donné dans le panneau, pour l'enfant, mais mon pognon là-dedans ? Ah c'est sûr, c'était bien trouvé ! Tant qu'à faire, autant joindre l'utile à l'agréable et te faire un petit pécule par la même occasion ! Enfin… J'imagine que tu as tout dépensé, te connaissant…
En tout cas, je suis heureux qu'un enfant ne t'ait pas comme mère, c'est déjà une consolation!

S'il s'était imaginé qu'elle allait mettre quelques affaires dans un sac et filer, il s'était lourdement trompé. Au lieu de ça, la téméraire s'avança vers lui en lui demandant s'il se rappelait qu'elle était son rayon de soleil. Elle lui rappela qu'il s'était inquiété lorsqu'elle avait été blessée au ventre, qu'il ne voulait manifestement pas la perdre, et lui assura qu'elle ne voulait pas le remplacer, qu'elle était venue pour lui, ajoutant qu'ils étaient faits l'un pour l'autre.

Sidéré, il la regardait et l'écoutait déballer son petit baratin, certain maintenant qu'elle n'était pas sincère. Il se rendait compte aujourd'hui de quoi elle était capable pour arriver à ses fins. Et malheureusement elle y était arrivée : Willow ne l'approcherait plus, il pouvait en être sûr. D'ailleurs, il ne savait même pas où elle était partie…

Un rictus méchant tordit sa bouche et il applaudit des deux mains.

Bravo, Manon, très joli numéro ! Tu as raté ta vocation, tu es très convaincante ! Seulement ça ne marche pas, dommage pour toi ! Il n'y a plus de rayons qui tiennent, le soleil s'est couché !

Furieux, il partit en trombe dans la chambre, sortit le sac de voyage de la jeune femme et ouvrit à la volée les tiroirs de la commode et les portes de la penderie. Décrochant des vêtements brutalement il jeta pêle mêle dans le sac tout ce qui lui tombait sous la main.

Dans 5 minutes tu es partie, Manon, dit-il menaçant, sinon c'est moi qui te jette dehors !

Manon était douce et presque sincère. Elle était sûre qu'en parlant calmement à Brian il allait marcher, quitter Willow et revenir à ses côtés. Le jeune homme avait lui, par contre, un air agacé. Il n'élevait pas la voix mais ses répliques étaient cinglantes.
"Je suis avec qui je veux" avait-il dit d'un air méprisant.
Il y a des années Manon n'aurait jamais imaginé Brian, son drogué, son homme violent, trainant avec les gens de "ces milieux là", les riches…

"Tu es "désolée" de m'avoir piqué de l'argent ??? Ce mensonge était le seul moyen de me récupérer ??? Autrement dit ta stratégie pour me récupérer était de me piquer mon fric ? Tu sais ce que tu dis, tu entends ce que tu dis ?!!
Effectivement j'ai donné dans le panneau, pour l'enfant, mais mon pognon là-dedans ? Ah c'est sûr, c'était bien trouvé ! Tant qu'à faire, autant joindre l'utile à l'agréable et te faire un petit pécule par la même occasion ! Enfin… J'imagine que tu as tout dépensé, te connaissant…
En tout cas, je suis heureux qu'un enfant ne t'ait pas comme mère, c'est déjà une consolation!" finit il par lancer, n'oubliant pas quelques légères remarques peu aimables au passage.

Je suis arrivée sans un sous dans la ville, j'ai du trouver un moyen… dit Manon en croisant les bras d'un air boudeur. Et puis je n'ai pas vraiment pensé à ça, je voulais juste me rapprocher de toi…

*…Et t'éloigner de la garce bourgeoise !*

Pensa Manon avec un air de chien battu, imaginant toujours que Brian allait mordre à l'hameçon et oublier d'un coup tout ses mensonges. Puis il se mit à applaudir. Manon haussa les sourcils, ouvrant ses grands yeux verts-marrons, surprise par cette réaction soudaine et écouta ce qu'il avait à lui dire.

Il n'en avait pas cru un mot, à croire qu'il n'avait rien écouté. ! Les hommes gobaient toujours ce que Manon débitait... Et pour finir il faisait de l'humour !
Brian disparut dans la chambre en faisant un vacarme impossible et revint avec un le sac de voyage de Manon d’où dépassaient laidement quelques vêtements mal rangés.

Elle grimaça et recommença son "show-tragique". A vrai dire elle s'amusait beaucoup… La jeune fille s'approcha de la fenêtre et regarda un couple s'embrasser puis tourna le regard vers Brian, les sourcils levés, faussement malheureuse.

J'suis désolée d'avoir tout gâché avec l'autre… Avec Willow ! dit-elle en se reprenant, un sourire à moitié aguicheur sur le visage avant de continuer tristement avec un air convaincu. J'ai fait des erreurs et je m'en excuse également. Mais toi aussi tu en as faites et Willow en faisait partie. Je sais qu'on est faits pour être ensemble, toi et moi pour toujours, c'est le destin. Maintenant je te pardonne et je peux même me teindre en blonde si tu veux…

*Non mais je rêve !!!*

Avait-elle le moindre remord de l'avoir dépouillé, le moindre scrupule tardif ? Pas du tout ! "Elle venait d'arriver en ville et devait trouver un moyen" fut tout ce qu'elle trouva comme argument pour justifier sa conduite, pas l'ombre d'une excuse ! Au contraire, elle affichait un air boudeur, s'estimant dans son bon droit. Son seul prétexte : elle voulait se rapprocher de lui.

Dans quel but, d'ailleurs ? Brian n'était pas dupe, sachant que le seul objectif de Manon était de séduire. Et le challenge actuel était de supplanter Willow, c'était certainement son seul moteur. Mais il avait perdu celle qu'il aimait, et par sa faute, c'est une chose qu'il ne réussirait jamais à lui pardonner.
Pourtant, Brian était conscient d'une chose : cette aguicheuse sentait qu'il lui échappait, voilà pourquoi elle était prête à tout pour le garder. La connaissant, il savait qu'il suffirait de simuler un quelconque attachement à son égard, de faire des projets avec elle pour qu'elle aille porter ses affections ailleurs.
Pourquoi pas ? Seulement, Brian ignorait à quel point sa rancœur lui interdirait de jouer le jeu de façon convaincante…

Pour le moment elle daignait enfin à s'excuser d'avoir tout gâché avec Willow – mon dieu quelle hypocrisie, comme si elle en pensait un traître mot ! – et minaudait qu'elle avait fait des erreurs et qu'elle en était désolée. Presque convaincante, pour un non initié…!
Elle n'oublia pas toutefois de préciser qu'elle et lui étaient faits pour être ensemble, et que c'était le destin.
Voilà qui allait faciliter les choses à Brian, elle les lui tendait sur un plateau.
Elle ajoutait qu'elle lui pardonnait, et il faillit s'étouffer de rage, mais réussit à se contrôler, et lui proposa de se teindre en blonde. Il la regarda d'un air critique : en blonde elle serait affreuse !

Ecoute… dit-il d'un air apparemment confus. Je me suis un peu emballé, je n'ai pas cherché à tenir compte de tes sentiments… Je crois que toi et moi on devrait repartir à zéro, sur de bonnes bases, parce que tout était faussé au départ.

Il s'approcha d'elle et la prit dans ses bras, posant ses lèvres sur son front, surmontant sa répugnance.

Tu serais mignonne en blonde, pourquoi pas ?
Tu as raison, on se ressemble et on est faits l'un pour l'autre… On pourrait peut-être s'installer, tu vois ? Avoir une petite vie pépère, ça nous changerait un peu. Et cet enfant que tu voulais on pourrait le faire, voire même plusieurs. Tu serais parfaite en mère au foyer, à t'occuper de la maison… Tu veux ?
Pour sceller nos retrouvailles et nos projets d'avenir je vais aller chercher une bouteille de vodka chez l'épicier, et on va se faire un petit dîner en amoureux en parlant de nos projets matrimoniaux…. si tu es d'accord pour m'épouser… On en parle à mon retour… Tu seras ravissante avec un gros ventre, je vais adorer…

L'embrassant dans les cheveux il se dirigea avec hâte vers la porte, - il avait besoin de changer d'air - se retournant toutefois avec un sourire pour la regarder avant de sortir. Le sourire n'était pas forcé, il était sûr à 200 % que lorsqu'il reviendrait elle se serait envolée.

*Quoi ?!*

Manon n'y comprenait plus rien. Il y a quelques minutes Brian la frappait encore et maintenant, il s'excusait en disant qu'il fallait repartir sur de bonnes bases… Apparemment elle avait réussit à le convaincre et sourit ravie d'elle-même. Manon avait toujours su que Brian finirait pas se lasser de Willow, avec Manon il partageait tout. Leurs amis étaient les mêmes et leurs loisirs aussi. Ils s'étaient croisés à 16 ans et n'allaient pas se laisser séparer par une bourgeoise superficielle.

Oh Brian, je savais que tu changerais d'avis ! dit elle en souriant.

Puis il l'embrassa sur le front en la tenant dans ses bras et commença à raconter leurs vies futures. C'est à ce moment là que Manon se rendit compte du pétrin dans lequel elle s'était mise.
Elle réalisa qu'en blonde elle serait extraordinairement laide mais qu'en plus Brian parlait de projets qu'elle n'avait jamais, jusque là, envisagés. Il voulait s'installer paisiblement et avoir pleins d'enfants !
Elle s'imagina alors blonde, gonflée par les grossesses répétées avec pleins de marmots grouillant au tour d'elle, dans une maison de campagne.

*Brian tu vas trop loin là ! On se croirait dans un remake de la petite maison dans la prairie !*

Sous cette vision d'horreur, elle avala sa salive difficilement, se raidit et s'écarta légèrement de celui qu'elle avait essayé de conquérir pendant toute une après-midi.
Comment allait elle faire pour mener sa vie de débauche s'ils étaient mariés ? Elle baissa ses yeux, regardant son ensemble blanc taché de sang et n'osait même plus le regarder, il avait l'air tellement content…

*Je ne peux pas faire tout ça, j'en suis désolée… Je veux juste qu'on soit ensemble et que tu ne fréquentes pas Willow, je ne veux pas d'enfants ni de mariage…*

Mais elle n'arrivait plus à parler. Son enthousiasme était parti pour laisser place à la peur et au dégoût. Et soudainement elle repensa à la dernière phrase du jeune homme :

"Pour sceller nos retrouvailles et nos projets d'avenir je vais aller chercher une bouteille de vodka chez l'épicier, et on va se faire un petit dîner en amoureux en parlant de nos projets matrimoniaux…. si tu es d'accord pour m'épouser… On en parle à mon retour… Tu seras ravissante avec un gros ventre, je vais adorer…"

Elle n'avait plus qu'une seule solution : s'éclipser pendant qu'il était chez l'épicier. Ce n'était pas vraiment sympa mais Manon avait fait pire…
Il l'embrassa sur le front et lui sourit avant de sortir de l'appartement. Manon resta figée quelques secondes, puis se précipita sur son sac pour ranger les dernières affaires. Elle jeta un dernier regard à l'appartement, effleurant les meubles avec son index au passage, en se souvenant de tout ce qu'elle avait vécu ici et s'enfuit en courant.
La jeune femme appela un taxi et se retourna une dernière fois pour regarder l'immeuble de loin, avant de chausser ses grandes lunettes de soleil pour au moins cacher ses yeux au beurre noir.
Willow l'avait changé, il était irrécupérable…

* Dommage…*, pensa-t elle car même si elle l'avait manipulé et trompé, elle l'avait quand même bien aimé. Mais tant pis, c'était un de perdu et certainement dix de retrouvés…